« First, I didn’t trust you, but now I trust you » (au début je ne te faisais pas confiance, mais maintenant oui)

Cette phrase m’a été adressée par un chef après une dizaine d’heures de répétition et deux concerts. Pourquoi ce commentaire?

De mon côté, un solo de piccolo qui inclue une note sans fin, ou presque. Un vrai défi. Du sien, une expérience dans un autre ensemble où il a dû accélérer la musique pour que cette même note sans fin prenne fin plus vite.

Ça nous aura pris tout ce temps pour faire connaissance, pour qu’il puisse observer ce que j’étais capable de faire ou non et évaluer s’il pouvait, de son côté, faire son travail sans soucis. Tout ce temps pour arriver à dire je te fais confiance pour les prochains concerts.

Malgré toutes ces années à faire de l’orchestre, je n’avais pas réalisé l’importance de la confiance entre un chef et ses musiciens. En fait, je n’avais pas pris conscience qu’on devait parfois, purement et simplement, « gagner » cette confiance.

Un rappel, de part et d’autre, pour garder en tête que la performance, tout comme la création, demande de ne pas s’attacher à ce qui a été pour prendre forme.

C’est le lien qui prime. Lien à soi et à l’autre, pour permettre l’émergence du nouveau et de l’unique.

Une performance ne peut se passer à nulle autre place que dans le présent. En étant là pour soi et pour l’autre. Rester avec l’idée de la dernière prestation ou dans l’anticipation de la prochaine nous coupe de tous liens en temps réel.

Rester attaché à ce qui a été ou sera dit, fait et entendu, c’est vivre avec des attentes futures d’un passé qui ne sera jamais présent. Par peur ou par espoir, c’est l’instant qui nous file entre les doigts.

C’est oublier que chaque rencontre, chaque instant sont uniques!

Avoir confiance: en soi, en l’autre, au moment. C’est maintenant évident pour moi, la confiance permet.

Par manque de confiance en soi, il est difficile de se détacher du regard de l’autre; on cherche l’approbation, l’amour ou la reconnaissance chez l’autre. On aura beau travailler cette fameuse confiance, elle demande parfois un terrain fertile pour fleurir.

Offrir sa confiance à l’autre, c’est justement offrir ce terrain. C’est avoir la conviction que cette personne, que je connais peu ou beaucoup, a les capacités de faire et d’être ce qu’elle souhaite.

Avoir confiance en l’autre, c’est voir plus loin et plus grand. C’est percevoir ce qui pourrait être, au-delà des apparences. C’est voir la personne derrière ses actions et inactions.

Quand on m’offre cette confiance et ce regard, ça me permet d’être. C’est lorsque l’autre m’offre cette confiance que je commence à me permettre d’être ce dont j’ai envie.

C’est dans le regard confiant de l’autre que j’arrive à explorer l’inconnu et tester mes limites en toute sécurité.

Tout ça parce qu’on m’aura dit « Tu peux le faire, je le vois et j’y crois. Tu peux être qui tu es véritablement. Tu seras accueilli sans jugement. »

Avoir confiance en l’autre c’est permettre l’émergence du soi. Le tien comme le mien.

Quand ce chef m’a offert sa confiance, il s’est aussi permis de diriger ce solo comme il le souhaitait véritablement. Sans tenir compte de son expérience antérieure.

J’ai été mise au défi le soir même. Cette note si longue s’est étirée, m’amenant à tester mes propres capacités. Un moment magique a été créé, pour le plus grand plaisir des spectateurs. Et du mien également.

La confiance a permis ce moment. Pour moi, pour toi, pour nous.

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