On m’a demandé il y a quelques semaines de faire un atelier…en anglais.
J’ai vraiment hésité, mais j’ai quand même dit « oui ». Vous savez, ce genre de oui qu’on dit et qui se transforme rapidement par « mais qu’est-ce qui m’a pris! »
J’ai pensé reculer et dire que c’était trop, que je n’étais pas capable de le faire. Mais comme c’est important pour moi respecter les engagements que je prends, j’ai plongé. J’ai donc commencé à travailler sur mon atelier, la peur au ventre.
La peur? Eh oui. Le simple fait de penser m’exprimer en anglais m’effraie.
Depuis que je suis toute jeune, je suis convaincu que je ne suis pas bonne en anglais. À l’école, j’étais une élève exemplaire, sauf en anglais!
Je me souviens encore être à l’école primaire et recopier des mots en anglais parce que j’avais eu une mauvaise note à mon examen. Je me vois clairement faire un petit dessin d’église à côté du mot church pour m’aider à me rappeler.
Cette croyance m’a suivi au secondaire où, naturellement, je ne comprenais absolument rien. Je voyais que les autres pouvaient répondre aux questions des professeurs et ça ne faisait qu’accentuer cette idée que j’étais poche. Je ne comprenais rien.
En fait, je ne sais même pas comment j’ai réussi à passer mon anglais de secondaire 5. Je comprenais 1 mot sur 5 et je devinais le reste. En arrivant au CEGEP, j’ai même été classé « débutant/remise à niveau ».
C’est tout de même à ce moment que j’ai commencé à apprendre réellement. Je me sentais toujours aussi nulle, mais au moins j’étais avec une gang de nuls. J’ai commencé à croire qu’il était possible pour moi d’y arriver.
Ça m’a motivée, je suis partie l’été suivant 3 mois à Vancouver pour travailler et pour apprendre pour vrai. Là-bas je n’ai pas eu le choix, j’ai appris.
C’est à ce moment que j’ai arrêté de traduire et que j’ai commencé à penser en anglais. Sont ensuite venus mes deux étés de stage à l’Orchestre National (98% en anglais) où j’ai pu vraiment m’améliorer. J’ai aussi lu tous les Harry Potter en anglais ainsi que plusieurs Clavin and Hobbes et j’ai arrêté d’écouter les films traduits.
Bref, je peux dire aujourd’hui que je comprends l’anglais et que je peux le parler. Malgré tout, je me trouve toujours nulle et je stresse à l’idée de devoir prononcer des mots en anglais devant quelqu’un.
Vous comprenez maintenant le défi qui m’attendait à animer un atelier de 75 minutes devant une trentaine de personnes en anglais. J’étais terrorisé!
Malgré la peur, je l’ai fait. Et vous savez quoi? Ça très bien été!
Je n’étais pas vraiment à l’aise, j’étais nerveuse et j’avais souvent l’impression de faire n’importe quoi. Particulièrement lorsque je m’accrochais dans un mot. De plus, les étudiants ne participaient pas énormément et je ne pouvais m’empêcher de penser que c’était parce que je m’exprimais mal.
Lorsque j’ai repris mes feuilles de commentaire à la fin de l’atelier, j’ai été assez surprise de constater que les étudiants avaient vraiment apprécié. Aucun commentaire sur mon anglais parlé.
Alors que j’avais placé toute mon attention sur ce que je n’étais pas capable de faire, ça n’a dérangé absolument personne. La seule personne que ça « intéressait », c’était moi.
En fait, l’impression d’avoir tout faux n’était pas du tout réelle. J’étais la seule personne dans cette salle à croire que mon anglais était vraiment mauvais.
C’est exactement la même chose lorsqu’on fait un concert qu’on croit raté et qu’on vient tout de même nous féliciter. On est tellement convaincu de notre histoire qu’on ne comprend pas que quelqu’un d’autre ait pu apprécier.
Notre expérience, bien qu’elle soit vraie, n’est pas complètement réelle. L’état dans lequel nous sommes influence notre perception d’un événement et influence du même coup ce que l’on croit de nous-mêmes.
Ne vous croyez pas trop. Lorsque ça ne va pas comme vous voulez et que vous pensez avoir échoué, doutez. Parce qu’au-delà des erreurs, il y a certainement plusieurs réussites.
Picasso a justement dit ceci: j’essaie toujours de faire ce que je ne sais pas faire, c’est ainsi que j’espère apprendre à le faire.
Osez faire ce que vous croyez ne pas être capable de faire. Vous apprendrez probablement plus sur vous-mêmes qu’en faisait seulement ce que vous maîtrisez.
En tranquillement, vous pourrez dire « oui je peux! »