Performer ne tient pas vraiment compte de la vie.
Cette vie qui bouge sans cesse, qui vous amène dans les plus hautes sphères comme dans les catacombes. Parce que la vie est tout sauf statique.
Rien n’est permanent.
Parfois, les changements sont minuscules. Tellement que nous ne remarquons rien à moins d’y être pleinement attentifs. D’autre fois, la vie vous réserve la surprise d’un gigantesque tsunami. Un changement d’une telle envergure que rien n’est plus pareil par la suite. Il existe maintenant un avant et un après.
Qui dit performance dit résultat solide et prévisible qu’il sera possible de reproduire dans toutes circonstances, sans faille.
Comment arriver à un résultat identique, jour après jour, dans une vie en perpétuel mouvement? Je ne peux même pas prévoir ce qui se passera de façon précise dans la minute qui suivra, comment puis-je espérer connaître comment se déroulera ma prochaine performance?
Bien sûr, j’ai tous mes acquis. La structure de fond est solide lorsque j’offre une performance. J’ai mis des années à développer mes compétences musicales. À cela s’ajoute une quantité impressionnante d’acquis personnel de toute sorte.
Toutes ces capacités sont bien présentes, prêtent à être utilisé lorsque j’en ai besoin. Je le sais, mais parfois leur accessibilité est compromise.
Je n’ai pas le contrôle sur ma météo intérieure et lorsqu’une tempête se déclenche, ce n’est pas le temps d’observer le paysage. Ce n’est même plus le temps de penser se rendre à destination.
Lorsque le bateau tangue, que les vents se lèvent et que le courant décide du chemin à prendre, on préférerait que le soleil continue de briller.
On hurle, on maudit le vent et la pluie, on se bat contre le courant et on s’épuise à vouloir tout combattre. Ou bien on court se cacher dans la cale, laissant notre sort entre les mains du destin. On peut même décider de quitter le navire, mais impossible de fuir la tempête.
Alors je choisis autre chose. Je choisis d’être là. Simplement là, présente à ce qui se passe.
Lorsque ma météo intérieure se déclenche, j’observe et j’accueille. Je plonge tête première, je vis l’événement à plein. J’oublie la destination, il sera toujours temps de réajuster plus tard.
Étrangement, lorsque je me laisse aller à toutes ces émotions qu’on souhaite généralement éviter (stress, peur, colère, tristesse, etc), je me sens tellement plus vivante!
Non ce n’est pas toujours agréable. En fait, c’est même rarement agréable. Ce n’est pas pour rien qu’ont évité généralement ces états d’âme.
M’y plonger m’aide pourtant à me découvrir. À comprendre mon écosystème. À m’en faire un allier plutôt qu’un ennemi. J’apprends à naviguer. Je découvre où placer mon énergie. Ça me permet aussi d’apprécier d’avantage les accalmies, les doux vents et la chaleur du soleil.
Il y a même des tempêtes tellement puissantes qu’elle m’amène à mille lieues de mon point de départ et de l’endroit où j’espérais me rendre. Je pourrais m’y perdre. Je pourrais aussi découvrir des coins de paradis. Tout est une question de point de vue.
Et mes acquis? Ils m’aident à rester sur le bateau. Ils me permettent de garder le contrôle de ce qu’il est possible de contrôler. Ils m’aident à garder espoir sur l’issu. Me dire que j’en sortirai vivante, plus forte.
Oui il arrive parfois que le bateau ait besoin de sérieuse réparation après le passage de la tempête. Qu’il soit même sérieusement amoché. Je prendrai le temps de le réparer.
Après la tempête, mon bateau sera peut-être plus fragile, mais moi, j’aurai appris.